Laneffe
Le village de Laneffe
Village traversé par la Thyria et coupé en deux par la nationale Charleroi-Couvin, Laneffe compte à ce jour près de 1826 habitants, répartis sur une surface de 664 ha 03.
Cette localité campagnarde fut habitée au début de l’ère chrétienne comme en témoignent les tombes gallo-romaines découvertes sur son territoire le long de la voie Bavay-meuse.
Du wallon “l’neffe”, il faut chercher l’origine de Laneffe dans le mot “effe” qui signifie eau, étang ou marais en roman.
Au Moyen-âge, Laneffe était une seigneurie relevant de la cour féodale de Morialmé, territoire liégeois.
Les seigneurs appartenaient aux maisons de Laneffe, Soye, de Hemricourt, La Marck, de Campenne, De Glymes et enfin de Saint-Hubert.
Depuis le 12ème siècle, l’abbaye de Waulsort possédait des alleux (terres libres) à Laneffe, donnés par Jean de Ham et Rengarde de Morialmé.
Elle les tint ensuite de l’évêque de Liège de 1358 jusqu’à la fin du 18ème siècle.
En 1209, Bastien de Laneffe fit cession de l’abbaye d’Aulne, du patronat de l’église et des dîmes restées encore aux mains de la famille de Laneffe.
Cette donation fit naître des conflits entre les deux institutions monastiques, surtout au 15ème siècle.
En 1743, trois ans après que l’église paroissiale fut reconstruite, Aulne eut gain de cause et était seule décimatrice.
Jadis, Laneffe formait un centre métallurgique assez animé. On y extrayait du minerai de fer et on y voyait les flammes hauts-fourneaux.
En 1743, les mineurs de fer jouirent de privilèges contenus dans la charte dite « des minières de Morialmé ». Pendant la 1ère moitié du 19ème siècle, un haut-fourneau utilisant le coke comme combustible fut mis en activité.
Le transport du minerai qui se faisait uniquement par la route se trouva en facilité lorsque le chemin de fer atteignit Laneffe en 1848. Mais, 10 ans plus tard, les hauts-fourneaux furent démolis.
A découvrir…
L’Eglise Saint-Lambert
L’Eglise actuelle érigée entre 1732 et 1740 et dédiée à Saint-lambert, est l’œuvre de l’architecte Jean-Baptiste Chermanne, le même qui construisit l’actuelle cathédrale de Namur. Il s’agit d’un édifice à trois nefs, à clocher bulbeux, entièrement en pierre du pays.
On peut y voir :
En 1956, elle a fait l’objet d’un classement par la Commission des monuments et des sites, en même temps que le mur de clôture de l’ancien cimetière qui l’entoure.
Il a été restauré en 1971 par l’architecte Simon Brigode.
Le Château
Selon la tradition, le « vieux château » , qui est plutôt une gentilhommière sans prétention, aurait été bâti vers 1630 en face de l’église pour la famille de Fecheroulle, les seuls éléments probants étant la taque de cheminées d’un des salons datée de 1633 et provenant d’anciennes dépendances et une pierre calcaire sur laquelle est gravée la date de 1645.
La ferme-château
Située en bordure de la Thyria, en contrebas de l’actuelle nationale 5, cette construction néo-traditionnelle en moellons de calcaire a été rebâtie au 19ème siècle puis partiellement en 1923/1924 après l’incendie de la guerre 1914/1918. Elle a de nouveau été sinistrée lors d’un bombardement allemand en mai 1940. In ne subsiste que peu de vestiges du château d’origine.
La Confrérie Saint-Eloi
Instaurée en 1635 par le curé Remy du Terne et le seigneur Henry de Campenne. Ininterrompue jusqu’à nos jours, elle fut approuvée le 20 juillet 1640 par une bulle du pape Urbain XIII.
Le 26 juillet 1643, la confrérie obtint de s’associer à la 1ère confrérie du même nom établie à Béthune et Beuvry en France.
Elle se compose de 21 membres dont le mambour, charge, qui au fil du temps, est devenue inamovible et quasiment héréditaire, le prévôt étant désigné annuellement par les confrères.
Tous les membres ont à cœur la défense du culte de Saint-Eloi et la participation aux fêtes de juin et du 1er décembre, comme aussi l’entretien des chapelles ou potales érigées par la confrérie.
La marche Saint-Eloi
Les laneffois fêtent Saint-Eloi le 1er décembre date de sa mort en 659 et le dimanche le plus proche du 25 juin, date correspondant au transfert de ses reliques en la cathédrale de Noyon en France en 1157.
Anciennement les processions étaient rehaussées par la présence d’escortes armées, pour leur protection mais aussi pour rendre les honneurs. Actuellement, les escortes sont fournies par les marches folkloriques.
Au 16ème siècle, on faisait appel aux sociétés de l’époque, par exemple les gildes d’archers ou d’arquebusiers.
Diverses confréries rassemblaient des cavaliers, comme il en arriva à Laneffe. Saint-Eloi était devenu, en effet, le patron des cultivateurs, maréchaux-ferrants et ouvriers du fer.
La marche Saint-Eloi était jadis suivie par de nombreuses compagnies à cheval qui faisaient présent d’un « guidon », comme Florennes, Nalinnes, Walcourt…
Cet usage dura jusqu’à la fin du 18ème siècle quand Joseph II réglementa les processions qui quelques années plus tard furent interdites par les révolutionnaires français.
Le concordat de 1881 rétablit la liberté des cultes. Les processions furent de nouveau organisées et les escortes adoptèrent l’équipement des armées de l’époque par opportunisme.
Chaque année, en juin s’accomplissent la bénédiction des chevaux et la distribution des petits pains et des fanions de Saint-Eloi.
- La bénédiction des chevaux : selon la légende, Saint-Eloi avait un cheval très doux qu’il légua à l’abbé de l’église où il fut enterré, mais l’évêque de l’endroit s’en étant emparé, le cheval devint méchant. Le cupide évêque le rendit à son propriétaire et l’animal s’est alors adouci. On évoque donc Saint-Eloi pour les chevaux de trait et surtout pour l’apaisement des chevaux turbulents.
- La distribution de petits pains et des fanions de Saint-Eloi : Ces petits pains sont des symboles de partage et d’amitié. Bien qu’ayant vécu à la cour du roi Dagobert, Eloi a toujours été au service des plus pauvres. Les petits drapeaux de forme triangulaires représentant le Saint, un cheval de trait et une église. Beaucoup de personnes attachent ces fanions dans leurs écuries au-dessus de la tête des chevaux.
Sources :
SOUMOY E., Laneffe un peu de ses origines, in Le Point virgule, 1er juin 2002, pp1.
SOUMOY E., Laneffe…histoire…tradition, folklore…, in Le Point virgule, 1er juin 2002, pp8-9.
BOQUET Y., La fête de la Saint-Eloi à Laneffe, in Le Point virgule, 1er juin 2002, pp10.
Un petit bout d’histoire…
Isabelle est une des cloches- la plus grosse, de l’Eglise de Laneffe.
Durant la seconde guerre mondiale, cette cloche a connu quelques mésaventures…
Voici le sauvetage « d’Isabelle » tel qu’il a été publié dans le Point virgule en juin 2002. Le texte est de Francis Remy et a été publié dans le tome II de « Laneffe, mon village » (Jean-Yves Massart).
« Laneffe, l’après-midi du 23 janvier 1944, il fait froid et gris, les gens ont le cœur gros et la tristesse se lit sur les visages. Les allemands descendent Isabelle de son vieux clocher, elle est la plus grosse des deux cloches du village, qui, depuis 1826, sonne les joies et les peines d’une communauté unie.
Isabelle est bousculée, jetée en bas du mur de l’ancien cimetière, elle atterrit durement sur la place avant d’être chargée sur un camion, à côté de celle de Fraire.
Le camion démarre, il part pour Chastrès où une cloche est aussi chargée, c’est ensuite la kommandantuur de Philippeville, puis celle de Châtelet, une dernière vérification, et les voici toutes dans un entrepôt des verreries Foulcaut à Montignies-sur-Sambre. C’est là le lieu de stokage desservi d’ailleurs par une voie ferrée.
Les gens de Laneffe sont mécontents, Isabelle est partie et les nombreux résistants du village ont laissé commettre ce forfait. Les gars du M.N.B. sont eux aussi mécontents, et dès le lendemain soir des ombres se glissent furtivement chez Arthur Speleers à la rue Saint-Marcoux. Autour de la table, ils sont six, et la décision est prise, il faut récupérer la cloche. C’est ce que viennent de décider Arthur et son frère Georges Speleers, Roger Helson, Charles Sappaert, Hector Hautenne et Guy Bessinguer. D’autres gars de la région de Marcinelle sont chargés de reconnaître les lieux. Marcel Van ESCH, Franz Paternotte, Eugène Deschuyteneer, René Sampo et deux anglais prêtent main- forte pour neutraliser le café situé juste près de l’entrée de l’entrepôt.
Arthur Speleers centralise les informations et déclare possible l’expédition. Sur place, chez Clovis Hanoteau, on charge les poutrelles dans un camion à benne du père d’Hector Hautenne (une ford 2 tonnes de 1924 à essence). Le 7 février 1944, entre chien et loup, vers 20 h, le camion, piloté par Hector, emporte Guy et deux évadés russes cachés dans la benne avec des fusils à canon scié, Vasili et Félix.
Il suit la citroën conduite par Roger et dans laquelle se trouve également Arthur, Georges et Charles. Malheureusement dans la descente de Loverval, c’est l’incident stupide, le « tape-cul » du camion se détache. Le chauffeur effectue un demi-tour pour le récupérer, il accroche un tram, c’est la fuite et la partie est remise.
Le lendemain, le 8 février, la même expédition repart. Arrivés sur les lieux, Arthur place ses hommes, les allemands de garde sont maîtrisés et le téléphone coupé, on ouvre les portes, le camion entre et on repère la cloche de Laneffe, on la charge et, pour brouiller les pistes, on en emporte une deuxième, comme par hasard celle de Fraire, puis une troisième, celle de Roux qu’il fallut décharger, faute de place.
Retour direct sans ennui et sans oublier de jeter les clefs du corps de garde dans la Sambre en passant sur le pont Solvay, et le camion arrive à Laneffe et se gare dans la grange de Monsieur Mondron. La voiture s’arrête chez le curé Léon Laboulle et les occupants racontent l’expédition. Le curé ne croit pas à semblable exploit, il va sur place se rendre compte de la véracité des dires : eh oui Isabelle est bien là ! Pendant la nuit avec la complicité d’Alexandre Jallay et de son épouse, Alice Massart, concierge au château Vincent, un trou est creusé et les deux cloches sont enterrées dans le parc. Le lendemain matin, Alexandre et Alice transformèrent l’endroit en un joli parterre de fleurs.
A Laneffe, on se doutait que la cloche « était rentrée », mais c’est la loi du silence en attendant la libération. Bien sûr, ce jour-là, le 17 avril 1945, ce fut une explosion de joie générale, on déterra la cloche. Mais les mauvais traitements ont eu raison de celle-ci : elle était fêlée, entraînant sa refonte.